Des leçons et des menaces voilées de Imed Daïmi au ministre de la Justice

09/07/2015

Invité sur Shems FM, le ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa, a été interrogé sur l’affaire polémique du moment, à savoir l’interdiction de voyage émise à l’encontre des trois journalistes Noureddine Ben Ticha, Hamza Belloumi et Sofiène Ben Hamida.

La réponse du ministre fut des plus brèves : « Je suis en train de suivre l’affaire ; je pense que le juge d’instruction prendra la meilleure décision ».

Bien qu’elle ait été brève, la réponse du ministre lui a valu une salve de critiques virulentes de la part d’une partie des avocats de Moncef Marzouki, estimant qu’il y a là une ingérence dans le travail du juge. Surfant sur le sujet, le secrétaire général du CPR, Imed Daïmi, s’est fendu d’un long texte sur sa page officielle Facebook, sous forme d’une lettre ouverte qui ne dit pas son nom, mélangeant les leçons et les menaces à peine voilées.

Imed Daïmi estime que les propos du ministre sont dangereux car il peut y avoir une multiplicité d’interprétations. D’après lui, les propos du ministre peuvent être compris comme s’il s’agissait d’orientation ou d’avertissement au juge. Poursuivant ses procès d’intention et sa théorie du complot, Imed Daïmi indique que les propos du ministre coïncident avec la campagne médiatique observée actuellement et qui laisse penser qu’elle est dirigée depuis une antichambre ayant un pouvoir sur ces tribunes médiatiques.

 

« Je ne sais pas Monsieur le ministre pourquoi vous suivez cette affaire de près précisément et pourquoi vous participez à une émission radiophonique pour la commenter (…) Vous ne pensez pas qu’il y a, avec cette intervention, une suspicion de politisation de cette affaire et de pression sur la justice ? Surtout que l’un des accusés est dirigeant dans le parti qui vous a proposé au ministère. Et que l’accusateur est l’ancien adversaire du président Caïd Essebsi devant qui vous avez prêté serment ?
Monsieur le ministre, vous avez porté tort à vous-mêmes avec cette intervention et soyez certain que vos propos vont jeter de l’ombre sur cette affaire. Toute décision prise en faveur des accusés, comme la levée de l’interdiction de voyage même si elle est prise par le juge, sera comprise par un large pan de l’opinion publique qu’elle résulte de la pression ou de l’intervention. Et si, comme le craignent les avocats, le juge est dessaisi de l’affaire, même avec une promotion, le ministre perdra sa crédibilité, ainsi que le gouvernement et le prestige de l’Etat ».

 

On précise que la courte intervention du ministre vient suite à une grande polémique sur l’utilisation du code pénal par le juge, au lieu du code relatif à la presse dans une affaire de délit de presse. L’accusation a déposé sa plainte sur la base du code pénal en accusant les journalistes de faux et usage de faux, pour un montage vidéo ordinaire qui a repris les propos incendiaires de l’ancien président Moncef Marzouki à Doha dans un discours d’une heure et demie. L’accusation estime que le montage était une falsification de document. L’affaire est politisée dès le départ et la décision du juge a été critiquée, puisque la non-utilisation du code de la presse dans une affaire de délit de presse est une menace du retour de la répression et de l’utilisation de la justice par la sphère politique.

Contrairement à ce que prétend Imed Daïmi, il y a un large pan de l’opinion publique qui soutient les quatre journalistes Noureddine Ben Ticha, Hamza Belloumi, Sofiène Ben Hamida et Insaf Boughediri et les couvertures médiatiques du sujet, ainsi que les réactions du public, en témoignent.

On rappelle que, paradoxalement, le même Imed Daïmi était il y a quelques semaines à peine chez le ministre de l’Intérieur pour lui parler de sa propre affaire dans laquelle on le suspecte d’être de mèche avec l’individu qui a usurpé l’identité de son collègue Mabrouk Hrizi. Imed Daïmi a multiplié les déclarations sur cette affaire, mais il n’y a eu aucune voix (même des supposées antichambres dont il parle) pour dire que les propos du député du peuple sont assimilables à une pression du pouvoir législatif sur la justice.

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