Islam, les deux faces d’une religion
01/07/2015
Un terroriste est allé sur une plage de Kantaoui armé d’une kalachnikov. Il a tiré sur les touristes et en a tué et blessé des dizaines. Pourquoi ?
Il a fait ça car, pour lui, ces touristes sont des mécréants en terre d’Islam et qu’il faut les exécuter. Dans un second temps, frapper le tourisme et donc l’économie du pays, permettra d’instaurer un chaos propice à la venue de Daech en Tunisie. Donc, tout cet argumentaire repose sur un référentiel religieux qui préconise la conquête, l’application de la chariâa et de la parole de Dieu, et autres joyeusetés du genre.
Entretemps, plusieurs employés d’hôtels et maîtres-nageurs ont accompli un geste héroïque. Outre ceux qui ont transporté des blessés, certains ont formé un bouclier humain pour empêcher le terroriste de faire encore plus de victimes. Pourquoi ?
Ils ont fait ça en disant : « La mort est unique ». Cette assertion se repose sur un référentiel religieux qui veut que la mort de chacun d’entre nous tienne du destin et soit commandée par Dieu. En d’autres termes, si on doit mourir on mourra, c’est décidé par Dieu. Ils ont fait ça pour protéger ceux qui étaient sous leur garde. Nos traditions et l’Islam commandent de protéger, d’honorer et d’être généreux avec les invités, de quelque religion qu’ils soient. Par conséquent, on peut dire que les employés qui sont parvenus à honorer la Tunisie pendant cet épisode tragique se sont basés principalement sur ce que leur commandaient leur religion et leurs cœurs.
La question qui se pose devient évidente. Prenons ce groupe de personnes que forment le terroriste et les employés d’hôtels ainsi que les maîtres-nageurs. Ce sont des personnes qui viennent plus ou moins du même milieu social, ils ont eu à peu près la même éducation, vivent dans le même environnement, ont la même religion et presque le même âge. Pourquoi certains d’entre eux sont des héros alors que l’autre est un terroriste capable de tuer des dizaines de personnes de sang froid ?
Si on arrive à trouver une réponse à cette question, on résoudra le problème du terrorisme en Tunisie. Certains diront que c’est la misère, le manque de culture, le fait d’avoir été embrigadé par des radicaux, le chômage…un mélange de tout ça. Ce qui est sûr, c’est qu’il existe un réel problème de terrorisme en Tunisie. Dans la lute contre le terrorisme mais aussi et surtout dans sa production. La Tunisie est l’un des pays qui fournissent le plus de terroristes au monde. La nationalité la plus représentée en Syrie est celle des Tunisiens. Pourquoi ? Quel désarroi, quel désespoir peut-il pousser quelqu’un à faire ça ?
Revenons à l’Islam, ou plutôt à la position de cette religion dans notre société. Premièrement, il ne faut pas sous-estimer le fait que pendant des décennies, la religion et tout ce qui a trait au religieux, a été diabolisé par les pouvoirs en place. Par conséquent, il y a eu deux effets concomitants, le premier a engendré l’isolation des adeptes « politiques et sociaux » de la religion. Le deuxième tient à la fascination et à l’attirance que peut exercer l’interdit. A partir du moment où le religieux est devenu soupçonné d’être dangereux et nuisible, il a eu encore plus d’adeptes.
Aujourd’hui, la lutte contre le terrorisme doit se faire dans les têtes et pas seulement dans les corps. Toutefois, il est difficile d’occulter le fait qu’il existe très peu de travaux innovants et « actuels » concernant ces questions. Bien évidemment, il est recommandé de se replonger avec plaisir dans les excellents travaux de Mohamed Talbi ou dans les livres de Youssef Seddik. Mais pour les jeunes cela reste du virtuel, cela reste éloigné de leur vécu quotidien. Il faudrait établir cette correspondance entre le vécu quotidien et les principes généraux d’un exercice religieux tolérant et équilibré. Pour cela il faudrait des structures et des maisons de jeunes. Des structures qui peuvent se substituer à la mosquée, au café ou au bar.
Combattre Daech c’est aussi et surtout combattre son idéologie et son dogme. Aujourd’hui en Tunisie, il existe 5200 mosquées pour 350 maisons de jeunes et 382 bibliothèques publiques. Au vu de ces chiffres, la stratégie semble s’éclaircir et celle là n’est pas seulement applicable à partir du 1er juillet.
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