La Banque de Tunisie : des chiffres au vert pour 2014 et une année 2015 prometteuse
18/06/2015
La Banque de Tunisie (BT) a tenu ce mercredi 17 juin 2015 son Assemblée générale ordinaire pour l’exercice 2014, sous la présidence de Mohamed Habib Ben Saâd, président du Conseil d’administration et directeur général de la banque.
Une assemblée qui a été marquée par un exposé détaillé de l’activité de la banque et qui n’a pas échappé aux habituelles et virulentes critiques du célèbre actionnaire, Mustapha Chouaïeb, et de quelques-uns de ses coups de colère ! On notera qu’en contrepartie certains actionnaires étaient ravis des résultats affichés et des progrès enregistrés.
A cette occasion, un hommage posthume a été rendu à feu Mohamed Riahi et Abdellatif El Fekih qui nous ont quittés cette année et qui étaient connus pour leur expertise dans le domaine bancaire. Le directeur général de la BT a remercié son personnel, sans lequel la banque n’aurait pas pu enregistrer ce résultat.
La BT a amélioré son résultat net de 18,91%, s’établissant à 87,68 millions de dinars (MD) en 2014 contre 73,73 MD en 2013 et ses actionnaires auront droit à un dividende de 300 millimes par action, à compter du 26 juin 2015.
La banque a enregistré, pour l’exercice 2014, une amélioration de son Produit Net Bancaire (PNB) de 9,26%, passant de 179,8 à 196,44 millions de dinars (MD), grâce à des dépôts en progression de 9%, situés à 2.922,39 MD et des crédits nets octroyés à la clientèle, qui ont augmenté de 4,5%, atteignant ainsi 3.195,65 MD.
La banque a, également, eu recours aux bailleurs de fonds étrangers principalement auprès de la BEI, ce qui a généré la hausse de 87,07% de l’encours des ressources spéciales en 2014, qui s’élève à 82,59 MD, contre 44,15 MD fin de l’année 2013. Le coefficient d’exploitation a été réduit de presque 3 points en 2014 à 34,5% pour une productivité globale (Frais généraux/R.B.E) de 47,6%.
On notera que les charges d’exploitation bancaire ont augmenté de 18,18%, passant de 102,08 MD à 120,77 MD entre 2013 et 2014, (à cause des coûts des ressources et des commissions à payer) alors que les dotations aux provisions ont baissé de 9,86%, évoluant de 28,75 MD à 25,92 MD, notamment grâce à une reprise sur provisions radiées, de l’ordre de 281 mille dinars.
Côté ratios de gestion et de rentabilité, la banque termine son exercice avec des niveaux satisfaisants : 22,04% pour le ratio de solvabilité (Fonds propres/Risques), 126% pour le ratio de liquidité, 19,95% pour le ratio Fonds propres/Dépôts et 37,95% pour le ratio des immobilisations.
La banque a aussi étendu son réseau avec l’implantation de 8 nouvelles agences, portant leur nombre global à 112 agences. Concernant le cours de l’action, il a varié au cours de 2014 entre un minimum de 8,66 dinars et un maximum de 11,22 dinars.
Concernant le résultat consolidé, le groupe Banque de Tunisie, composé de 15 sociétés, a réalisé un PNB consolidé en hausse de 7,96% passant de 185 MD à 199,74 MD et un résultat net consolidé en augmentation de 21,04% évoluant de 86,289 MD à 104,441 MD, grâce notamment à l’apport de ses filiales : BT de 76,336 MD, Astree de 4,043 MD et Carthago 7,047 MD.
Pour leur part, les commissaires aux comptes ont relevé dans leur rapport que la banque a fait l’objet d’un contrôle social couvrant les exercices 2011 à 2013, qui a conclu à un complément de cotisations de 6,95 MD, et qu’elle conteste. L’affaire suit toujours son cours.
Ouvrant le débat, Mustapha Chouaïeb s’est insurgé contre le dividende de 300 millimes qu’il a jugé insuffisant, s’interrogeant sur quelle base il a été distribué alors que la banque a réalisé de bonnes performances lui permettant de distribuer un dividende plus important. D’ailleurs, pour l’appuyer, un autre actionnaire a souligné qu’une société, qui est récemment entrée en Bourse, augmente annuellement son dividende de 250 millimes.
Il a estimé que les salaires du PDG et des DGA sont élevés, et qu’ils doivent être indexés sur le résultat de la banque, signifiant que c’est l’Assemblée «souveraine» qui devra décider des montants à attribuer. En outre, il a vivement protesté contre le projet de résolution d’attribution des jetons de présence au titre de 2015 : «pourquoi je voterai pour quelqu’un d’autre qui achètera ses actions au cours de l’année. En plus, nous devons d’abord connaitre vos performances de 2015 avant de vous attribuer des jetons». Il a réclamé, dans ce contexte, les CV des membres du Conseil d’administration ainsi que ceux des membres formant les conseils d’administration des filiales.
L’actionnaire s’est interrogé, également, sur l’apport des 55 MD de réinvestissements exonérés ainsi que des Sicav de la banque, ainsi que sur la situation de la société SPPI. Il a espéré les participations croisées entre certaines sociétés du groupe, que le rapport des commissaires aux comptes a mis en évidence, et qui seront solutionnées d’ici la prochaine AGO, comme le prévoit l’article 466 du Code des sociétés commerciales.
Pour sa part, le président de l’Association des actionnaires minoritaires “ADAM”, Khaled Ahres, a exprimé le «ras-le-bol» des petits actionnaires face à deux points : leur représentation dans les conseils d’administration et le «très maigre dividende distribué» malgré parfois l’enregistrement de bonnes performances, soulignant qu’avant la révolution les gains des petits porteurs provenaient des plus-values, chose qui n’est plus de mise actuellement. Pour lui, il faut que les banques acceptent d’appliquer l’article 9 de la circulaire de la Banque Centrale de Tunisie N°2011-06.
Il s’est demandé si la banque prévoyait de changer de gouvernance. Il a demandé des précisions sur l’affaire du litige foncier du Club Aquarius de Nabeul et il s’est aussi interrogé sur les actions sociétales de la banque.
L’actionnaire Habib Bouzouita a, quant à lui, félicité le conseil et les agents de la banque pour les performances enregistrées pour l’exercice 2014, avec un bénéfice record et une amélioration du rendement des Fonds propres/Actifs. Ceci dit, il a reproché le fait que le coefficient d’exploitation ne cesse de se réduire et que le ratio de créances accrochées soit plus important avec une couverture des risques ayant baissée de 90% à 65%. Pour lui, il faut maintenir une rigueur face à la gestion des risques. Il s’est adressé aux commissaires aux comptes pour qu’ils expliquent la différence entre le montant de jetons mentionnés dans le rapport et celui mentionné dans les résolutions. Pour lui la banque s’est reposée sur ses lauriers, se contentant du «Small is beautifull» !
Moncef Oughlani a noté, «avec soulagement», que le conseil a pris en compte les remarques des commissaires et amélioré les ratios. Pour lui, il est évident que la banque s’améliore. Il a noté que les réserves sont à 4 fois les fonds propres et a estimé qu’il est temps pour une augmentation de capital.
Le représentant de l’Association des petits porteurs Hatem Logani s’est interrogé sur les raisons qui empêchent la banque de se développer en Afrique pour accompagner les PME tunisiennes. Une analyste a demandé, pour sa part, si le redressement social a été provisionné.
Mohamed Habib Ben Saâd a souligné, en réponse aux diverses interrogations, qu’aucun membre du conseil n’a bénéficié d’un moindre crédit ou avantage de la banque, chose que peut confirmer les commissaires aux comptes. Autre point, en réponse à une remarque de M.Ahres sur le litige des actionnaires avec une banque de la place à propos des transfères de fonds à l’étranger, le PDG a affirmé qu’«aucun millime ne va de la Tunisie à la France, sauf les dividendes des participations françaises».
Par rapport au réinvestissement des 55 MD, il a souligné que cela a fait suite à un paiement de 18 MD d’impôt et que cet argent sera investit comme le reste auprès de groupes tunisiens solides, qu’il ne peut pas nommer, mais dont leurs solidités est avérées, sinon les commissaires aux comptes auraient provisionnés les montants investis.
Concernant la SPPI, il a renchéri en ces termes : «Nous n’avons pas de sociétés perdantes dans le groupe de la BT», précisant que cette société est en cours de liquidation et que la BT a racheté la part des autres actionnaires d’où le déficit apparent de 135.000 dinars. Il a assuré, cependant, que la banque s’attend à une plus-value intéressante lors de la finalisation de la transaction.
En réponse à la question de M. Chouaïeb sur les salaires et les jetons de présence, M. Ben Saâd a précisé que le salaire du PDG n’a pas été augmenté par rapport à l’année dernière, soulignant que ce que perçoit la direction et le conseil «n’est pas une folie» en se comparant aux autres banques, «qu’ils sont au dessous de la moyenne par rapport au secteur» et qu’il est déjà indexé sur le profit de la banque. Concernant, la composition des conseils, il a souligné qu’il ya une transparence totale et que la banque n’a rien à cacher.
En réponse à l’interrogation de M. Ahres sur le changement de gouvernance, il a répondu positivement expliquant qu’un projet de lois est actuellement remis aux autorités pour la séparation entre le poste de président du conseil d’administration et celui de directeur général, chose qui sera en vigueur d’ici un an à un an et demi, dès l’adoption de la loi.
Concernant le litige de Nabeul, il a expliqué que le terrain a été un don et qu’après le décès de la personne, ce don a été contesté par la famille. L’affaire est devant les tribunaux depuis 5 à 6 ans et les choses vont dans le bon sens. Ceci dit, la banque ne pourra investir dans le projet tant que le problème ne sera pas définitivement réglé.
Pour le volet sociétal, le PDG a expliqué qu’il est vrai que la BT ne communique pas sur ses actions sociales. Il a indiqué à titre indicatif que la banque allait rénover cet été deux écoles l’une à Jendouba et l’autre à Siliana.
Il a contesté l’avis du président d’ADAM sur le rendement de la valeur boursière du titre de BT. En effet, il a souligné que le rendement du titre BT est 20,5% sur 10 ans (l’un des meilleurs rendements) et que l’actionnaire qui possédait 100 actions possède actuellement 300 actions, grâce à la distribution de dividendes gratuites. Il a noté que l’augmentation de capital est à l’étude est que la banque opère une augmentation dès que le capital devient à 33% des réserves.
En réponse à M. Bouzouita, il a souligné que le positionnement de la banque est une question fondamentale, mais que la concurrence est rude sur un marché qui n’évolue pas. Il a précisé qu’au 1er trimestre 2015, alors que le secteur bancaire a enregistré, pour la première fois depuis l’indépendance, une baisse des dépôts, la BT a su tirer son épingle du jeu enregistrant 11% de hausse dans les dépôts. Il a souligné qu’il y a un équilibre fragile à garder entre la croissance et la maitrise des risques, notant que la crise actuelle du secteur hôtelier a augmenté les risques accrochés, malgré le fait qu’ils travaillent avec «les meilleurs des meilleurs». La banque a dû donc provisionner ces montants. Quant au coefficient d’exploitation, il a été affecté par les nouveaux recrutements de chargés de clientèles, de nouveaux postes crées au sein de la banque et dont l’objectif est le démarchage de nouveaux clients et l’amélioration de la qualité de service.
Concernant les jetons de présence, les commissaires aux comptes ont précisé que dans leur rapport, les jetons ont été divisés en deux, une partie dans la colonne du conseil et l’autre étant comptabilisée dans celle de président du conseil.
En réponse à une question sur le système informatique de la banque, le PDG a tenu à préciser que leur système a été créé par ses équipes et qu’il est «absolument performant» et qu’il dispose de tous les moyens de suivis et de contrôle.
En réponse à l’analyste, Mohamed Habib Ben Saâd a souligné que le montant du redressement a été totalement provisionné. Il a expliqué que la banque a créé une épargne pour son personnel : un capital vie chez sa filiale Astree, qui est légal. Ceci dit, il a confié que les banques ont ressenti qu’un besoin d’argent a fait changé de cap la CNSS. D’ailleurs, l’UIB, Attijari et l’Amen Bank ont été également redressés. Les échos sur leurs procès laissent penser que les choses vont aller dans le bon sens.
Pour la conquête de l’Afrique, le PDG a expliqué qu’avec les parts de marché actuelles, les banques tunisiennes ne peuvent pas sortir à l’étranger.
Enfin, concernant la candidature des petits porteurs pour un poste au conseil d’administration, le PDG a rappelé que le secteur bancaire est très contrôlé par la BCT. Il faut que la candidature détaillée soit présentée à la BCT avant 2 mois, avant présentation du candidat pour validation à l’AGO. En outre, la loi bancaire définit exactement le profil des personnes pouvant accéder aux conseils des banques. Il a relevé que la loi n’est pas claire quant à la manière de nommer le représentant des petits porteurs.
Le DGA Zouheir Hassen a rassuré les actionnaires par rapport aux perspectives de 2015. La BT prévoit, ainsi, de réaliser une progression de 12% des produits d’exploitation bancaire et de 7% de son PNB pour dégager un Résultat Brut d’Exploitation en hausse de 11%.
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