Lecture de la Loi de finances 2016 par un expert comptable
04/01/2016
Anis Wahabi, membre du Conseil de l’Ordre des experts comptables est revenu, dans une interview accordée ce lundi 4 janvier 2016 à l’émission Expresso de Wassim Ben Larbi sur Express Fm, sur les changements apportés par la Loi de finances 2016 et les articles de la Loi de finances complémentaire 2015 qui sont entrés en vigueur à partir de ce début d’année.
M. Wahabi a indiqué que pour encourager la création de PME, les entreprises industrielles qui seront créées au cours de 2016 et qui auront un chiffre d’affaires annuel inférieur à 600 mille dinars, seront exonérées d’impôt pour les 5 ans à venir.
Concernant le secteur des services, les sociétés créées par des chômeurs diplômés et ayant fait un chiffre d’affaires annuel inférieur à 300 mille dinars, seront également exonérées d’impôt pour les 5 premières années. Pour lui, plusieurs structures vont essayer de bénéficier de cette mesure.
Autre point, l’expert comptable a aussi évoqué, l’augmentation de la limite de la prime d’investissement, des investissements réalisés dans le cadre du code d’incitation aux investissements, passant de 5% à 15%.
Il a appelé les autorités financières à faire chaque fin d’année un bilan des mesures décidées en terme de création d’emploi, d’entreprises et d’investissements, afin d’être capable de les évaluer.
Pour lui, dans sa lecture de la Loi de finances, il perçoit 3 amnisties. La première (art.14) est relative à tout nouvel investissement effectué en 2016 dans le cadre du code d’incitation aux investissements (sans plafond), individuel ou dans le cadre des avantages fiscaux, dans le cadre du compte épargne action ou dans le cadre du compte épargne investissement : l’investisseur ne sera pas interrogé sur la provenance du capital et ne payera pas d’impôt. Il s’est interrogé sur le fait d’engager ce genre d’amnistie alors que le gouvernement est en guerre contre l’économie parallèle. Pour lui, par cette mesure, le législateur veut réintégrer dans le circuit officiel, les sommes qui ont été cachées à son insu. Mais à quel prix ?, s’est-il interrogé.
La deuxième concerne la possibilité de diminution des amendes de retard et de contrôle, une mesure permanente selon l’article 25 du Code de comptabilité publique. Ainsi, chaque personne qui a eu un contrôle fiscale et qui doit de l’argent à l’Etat, si elle paye le principal en 3 mois, le ministre des Finances, suite à une demande du fraudeur, peut l’exonérer de 100% des amendes et pénalités. Donc, une amnistie durable sur les pénalités.
La troisième est une amnistie douanière importante. Ainsi ceux qui ont des amendes avec la douane payent le principal et si les pénalités sont inférieures à 1 million de dinars, ils sont exonérés de 90% et de 95% au-delà de ce montant.
Interrogé par Wassim Ben Larbi sur l’efficacité de ces mesures, Anis Wahabi a répondu par la positive. Concernant les aspirations en termes d’entrée d’argent, il a précisé que même le ministère des Finances n’en a aucune idée. Il estime que les amnisties dans lesquelles, il y a un abattement sur le principal sont meilleurs.
Depuis ces 5 dernières années, on ajoute des articles pour lutter contre l’économie parallèle, l’évasion fiscale et la contrebande, mais l’économie informelle gagne du terrain et elle a dépassé les 50% de l’économie nationale, note-t-il. Pour lui, ce n’est pas la solution, il faut des mesures plus intelligentes !
Concernant le régime forfaitaire (buraliste, chauffeur de taxi, le coiffeur, l’épicier,… les petits commerces), jusqu’à 2013, les 400.000 forfaitaires, le tiers de la population fiscale, participaient aux recettes fiscales 0,18%. Ce qui est une aberration en-soi ! Pour lui, il n’est pas normal qu’un chauffeur de taxi ou un buraliste (Hamas) paye seulement 150 dinars d’impôt par an.
Il a annoncé le report de l’exonération de la tranche de revenu de 5.000 dinars de l’IRPP, prévue pour 2016, à 2017. Cette mesure décidée dans la Loi de finances complémentaire 2015 a été revue, 3 mois à peine, dans la Loi de finances 2016, à cause des coûts importants : 700 millions de dinars qui seront pris en charge par l’Etat, si cette mesure entrait en vigueur en 2016.
Autre mesure, pour ceux qui louent un local logement ou commercial, l’abattement passe de 30 à 20% : donc avant ils payaient l’impôt sur 70% du loyer collecté, aujourd’hui c’est passé à 80% du loyer collecté.
Anis Wahabi a, également, évoqué l’extension du champ d’application de la TVA à de nouveaux produits et services assujettis à un taux de 6%: notamment l’enseignement privé, les garderies, les jardins d’enfants, les auto-écoles, l’exploitation des douches, les chauffe-eau solaires, les matériels et équipements destinés au nettoyage des villes,… soit une vingtaine de produits. Parmi les sujets qui ont fait polémique, celui de l’imposition des médicaments à la TVA au taux de 6%, sans la révision des prix de vente dans les pharmacies, donc entrainant la baisse de la marge de ces derniers.
Grâce au timbre de voyage, l’administration fiscale récolte 10 millions de dinars, alors que 10 millimes que le boulanger ne rend pas à son client coûtent à l’Etat 10,4 millions de dinars. Concernant la vignette, les sociétés d’assurance ne pourront assurer un véhicule qu’après avoir prouvé que la vignette a été payée, cela va pousser certains conducteurs à ne pas payer leurs assurances.
En outre pour l’achat ou construction d’un logement (unique) et dont le coût ne dépasse pas les 200.000 dinars, il y a la possibilité d’avoir des remises au niveau des impôts, les intérêts et commission de crédit étant déductibles de la base imposable (Il gagne 20% des intérêts).
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